HAMBURGER HILL (John Irvin, 1987)

Vietnam, mai 1969 : tandis que s’ouvrent les premières négociations visant à mettre fin à la guerre, la 101e division aéroportée continue de se battre sur le front. Les blessés et les morts sont évacués, remplacés par de jeunes recrues tout juste débarquées. L’état-major ordonne de conquérir une colline d’importance stratégique, surnommée de manière dérisoire « Hamburger Hill » par les soldats. La lutte pour le monticule de terre durera dix jours…

« Vous pensez que vous avez des problèmes parce que vous êtes contre la guerre, que vous avez manifesté en fac, que vous portez des symboles pacifistes et que vos actions ne sont pas en accord avec vos opinions ? Je suis orphelin, mon frère est pédé, toute la ville de Chicago à la chtouille grâce à ma sœur. Ma mère boit, le vieux crache ses poumons, j’ai de l’herpès, le pied d’athlète et le colon plein de vers et la guerre a ruiné mes chances de devenir un jour un très grand médecin. Vous n’avez aucun problème, excepté moi… ». Telle est l’une des nombreuses punchlines aiguisées lâchées par Dylan McDermott, comédien dont la prometteuse carrière se destinera à devenir un excellent second rôle récurent du cinoche américain.

On pourrait d’ailleurs trop hâtivement en conclure que Hamburger Hill est un simple émule de Platoon et Full Metal Jacket, deux métrages arrivant à point nommé après maints films de « namsploitation » outrageusement patriotiques (Rambo II, Portés disparus,…). A sa manière, Hamburger Hill parvient à tirer son épingle du jeu. Le film de John Irvin n’a donc aucunement à rougir face aux métrages d’Oliver Stone et Stanley Kubrick. Mieux : il parvient à dépeindre, sans pour autant en montrer une seule image, le malaise régnant dans l’opinion publique américaine à la fin des années 1960 face au conflit armé faisant rage au Vietnam.

Malgré le côté frontalement gore pour l’époque (qui anticipe d’une certaine manière ce que fera Steven Spielberg avec Saving Private Ryan), le véritable sujet de Hamburger Hill se situe ailleurs. A travers sa vision de la camaraderie ne pouvant que souder des soldats très souvent envoyés au combat malgré eux, John Irvin parvient, via des interactions ciselées entre ses protagonistes, à mettre en lumière un évident désarroi.

Tout d’abord à travers le portrait de soldats noirs américains s’estimant jetés en pâture pendant que des fils de bonnes familles blancs ont réussi à échapper à leur incorporation. Ensuite via de simples quidams bien conscients, grâce au courrier qu’ils échangent avec leurs proches aux Etats-Unis, qu’ils ne seront à coup sûr pas traités comme des héros à leur retour, ce qu’on leur a fait miroiter si, de bonne fortune, ils en réchappent. Une œuvre essentielle sur la guerre du Vietnam, qu’il serait grand temps de réévaluer à sa juste valeur.

Texte extrait du livre « Le film de minuit – 1984-1994 : une décennie de séances culte »

Où voir le film ?

Hamburger Hill est disponible en Blu-ray et DVD chez Metropolitan.