
A Los Angeles, un homme mystérieux et solitaire surnommé « le Cow-boy » (Ryan O’Neal) est celui que tous les gangsters s’arrachent. Passé maître dans l’art de semer la police en voiture lors de braquages à hauts risques, il s’associe au besoin les services d’une énigmatique et ténébreuse beauté (Isabelle Adjani), parfaite comme alibi. Bien décidé à le coffrer, un flic tenace (Bruce Dern) le traque sans relâche…
En revoyant The Driver, on a beaucoup de peine à se dire que ce film-là fut largement éreinté par la critique de l’époque de sa sortie. Epuré à l’extrême, scénarisé sur du papier à musique, porté par un casting imparable et suranné par son hypnotique bande originale, le deuxième long métrage de Walter Hill a tout d’un film parfait.
Certes, Walter Hill repique certains éléments du scénario qu’il avait écrit pour Guet-apens (1972). Il tentera d’ailleurs, sans y parvenir, de convaincre Steve McQueen de rejoindre le casting du film, mais ce dernier ne souhaite pas apparaître dans une œuvre où l’influence de Bullitt est palpable à chaque seconde. Tourné essentiellement de nuit avec maints problèmes de production, Driver est pourtant un métrage dont les inconvénients finiront par devenir des atouts majeurs.

Abonné aux personnages sympas dans des films jugés trop gentillets, Ryan O’Neal endosse mieux que personne ce personnage de chauffeur énigmatique et taiseux, en apparence tout doux tout miel mais qui, tel un félin, sait exactement à quel instant laisser jaillir ses pulsions. Le parfait miroir inversé en somme du flic qu’incarne lui aussi à la perfection Bruce Dern, crâneur qui ne peut s’empêcher de la ramener inutilement.
Premier et seul film intéressant dans la carrière américaine d’Isabelle Adjani, The Driver permet à l’actrice d’éviter le sempiternel rôle caricatural de la « french girl ». Mystérieuse à souhait, jouant sur la retenue et affichant une beauté froide sans égale, la Française, alors âgée de 23 ans seulement, offre une performance en forme de parfait alter ego féminin de Delon dans Le samouraï (1967).
Jouant avec les pare-brise de bagnoles comme la réflexion d’une arme blanche, utilisant comme personne des endroits peu reluisants de L.A. comme décor, s’amusant avec les perspectives dans d’interminables scènes où la caméra, immobile, se « contente » d’attendre l’arrivée des protagonistes, Walter Hill signait ici une œuvre de référence qui, avec le temps, allait grandement gagner en estime et inspirer les cinéastes contemporains. Définitivement le film injustement boudé des seventies.
Texte extrait du livre « Le film de minuit – 1984-1994 : une décennie de séances culte »

Où voir le film ?
Sorti une première fois chez Studiocanal en 2015, Driver fut réédité fin 2022 dans une prestigieuse édition Steelbook 4K+Blu-ray. Epuisée, ladite édition a laissé place à un simple DVD peu compatible avec les standards actuels.
A noter que les versions 4K+Blu-ray et Blu-ray simple sont encore disponibles en Angleterre, avec des disques identiques en tous points. Il est également possible de dénicher sur différents sites de revente un Blu-ray paru dans différents pays (Australie/Allemagne/Italie/Norvège/Suède/Finlande) chez Universal il y a dix ans et qui contient, ô miracle, une version française et les sous-titres idoines.
Attention : évitez à tout prix un import US de The Driver : le film y est amputé, sur toutes les éditions disponibles outre-Atlantique, d’une scène essentielle entre Ryan O’Neal et Isabelle Adjani.
