
1971 : Charles Carroll, candidat démocrate aux élections présidentielles américaines, est assassiné lors d’une conférence dinatoire par un des serveurs. Ayant conclu à l’acte d’un déséquilibré, la commission d’enquête n’a pas jugé utile de retenir la thèse d’une éventuelle conspiration.
1974 : Lee Carter (Paula Prentiss), journaliste présente lors de l’assassinat de Carroll, est persuadée que les différents témoins de l’affaire se font éliminer méthodiquement et que, de surcroit, sa vie est en danger. Elle fait part de ses craintes à Joe Frady (Warren Beatty), reporter de petite envergure et ex-petit ami, qui ne prête pas grande attention à ses dires. Peu de temps après, Lee est retrouvée morte avec pour cause officielle du décès avancée, un suicide…
Dès l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy, l’Amérique va être en proie aux différentes théories complotistes. Rapidement, le Septième Art va s’engouffrer dans la brèche. Si les sixties laissent déjà émerger quelques perles, notamment grâce à John Frankenheimer (Un crime dans la tête, Sept jours en mai, L’opération diaboloque), les plus beaux fleurons du genre seront produits durant la décennie suivante.
A cause d’un assassinat ouvre les festivités auxquelles se joindront une kyrielle de métrages exceptionnels : de Conversation secrète à Marathon Man, de Capricorn One aux Trois jours du Condor, la quintessence du film de conspiration sera réalisée par le même Alan J. Pakula deux ans plus tard. Les hommes du président, chef-d’œuvre absolu, restant aujourd’hui encore comme l’œuvre ultime au registre « théorie du complot », mais également comme la meilleure représentation du métier de journaliste jamais vue à l’écran.
A cause d’un assassinat a donc en quelque sorte servi de brouillon aux Hommes du président. Mais quel brouillon ! Ouvrant la voie à un sous-genre encore aujourd’hui existant, Alan J. Pakula se permet une réalisation ultra-originale. Utilisant à chaque instant des ellipses de montage, le réalisateur court-circuite maints « passages obligés ». Outre le fait de semer la confusion dans l’esprit du spectateur, l’astuce permet à ce dernier de se glisser dans la peau de Joe Frady perdu dans les dédales d’une affaire qui, bien évidemment, le dépasse et dont il sera le bouc émissaire.
On retiendra également une courte séquence hallucinante et hallucinée : tandis que Frady tente de se faire recruter au sein de la firme qu’il soupçonne d’être responsable de plusieurs attentats politiques, il doit subir une séance d’initiation particulière via un film de propagande. Composé d’images anodines, voire rassurantes, le montage en répétition de la séquence, alternée de mots uniques utilisés de manière anarchique, rend l’ensemble terrifiant et fait basculer le métrage vers un dernier acte totalement paranoïaque : en deux petites minutes, Pakula démontre qu’un simple diaporama astucieusement présenté peut devenir une véritable arme.
Soutenu par une bande originale hypnotique de Michael Small, The Parallax View est un film aussi effrayant que puissant. Un pur chef-d’œuvre qui influencera maints cinéastes. D’ailleurs fort est à parier qu’Henri Verneuil a écrit son film I… comme Icare avec The Parallax View à l’esprit.
Texte extrait du livre « Le film de minuit – 1984-1994 : une décennie de séances culte »

Où voir le film ?
A cause d’un assassinat est disponible en Coffret Ultra Collector Blu-ray+DVD+livre (CUC pour les initiés) chez Carlotta. Une édition Blu-ray simple est également disponible, mais on ne pourra que conseiller à l’aficionados de thrillers paranoïaques 70s à se diriger du côté du coffret, le livre étant de qualité éditoriale exceptionnelle.